Le pari risqué de TSMC aux USA
C’est une petite musique inquiète à Taiwan : TSMC, le fleuron de l’industrie des semi-conducteurs de l’île, pièce stratégique s’il en est pour la survie de ce territoire revendiqué par la Chine, est-il en train de se vider de sa valeur ajoutée en investissant aux États-Unis ? Si les semi-conducteurs, le « pétrole » du XXI° siècle, sont produits aux États-Unis, les Américains pourraient être moins motivés pour voler au secours de Taiwan en cas d’attaque chinoise. C’est en tous cas la crainte.
TSMC produit plus de 50% des semi-conducteurs du monde, et a un quasi-monopole sur le segment le plus sophistiqué ; mais sous pression de l’administration Trump, puis de son successeur Joe Biden, le géant taïwanais investit en Arizona. Le Président des États-Unis et le fondateur de TSMC, Morris Chang, étaient présents la semaine dernière au lancement du chantier de la deuxième usine de TSMC dans cet État américain. TSMC investit jusqu’à 40 milliards de dollars au total, et sa première usine entrera en production l’an prochain.
La crainte, alimentée par les médias chinois, est de voir TSMC procéder sous pression américaine à un transfert de technologie qui priverait Taiwan de l’un de ses principaux atouts. En pleine période d’élections locales à Taiwan, perdues par le parti de la Présidente Tsai, TSMC a dû répondre : les usines américaines resteront une à deux générations derrière celles de l’île, et si 500 ingénieurs sont envoyés en Arizona, l’entreprise en garde 50 000 à Taiwan ! Et pour le prouver, TSMC a annoncé un nouvel investissement à Taiwan pour produire des « chips » d’1 nanomètre, là où les usines américaines produiront du 4, puis du 3 nanomètres. Il n’en demeure pas moins que TSMC n’avait jamais investi à l’étranger avant d’y être « invité » par Donald Trump, puis par Joe Biden, soucieux de réindustrialiser l’Amérique et de réduire les dépendances dans les produits stratégiques. Les Taïwanais sont à moitié rassurés.