Comme souvent, le mot seul n’est rien. C’est le contexte qui lui donne son sens véritable.
Concept idéologiquement très chargé, la lutte tient plus du combat que du diner de gala* et suppose par nature l’usage de la force ou de la violence. On pourrait se contenter de travailler ou d’œuvrer à un but particulier… Non. On lutte, car il y a des résistances et c’est ce qu’il faut éliminer.
La Chine nouvelle a montré combien les luttes pouvaient être cataclysmiques quand un mauvais vent soufflait sur des bonnes braises bien rouges. Que ce soit contre les insectes, les moineaux, contre des classes sociales (propriétaires terriens, paysans riches, intellectuels), contre les corrompus, les Droitiers, les contre-révolutionnaires et autres ennemis du peuple, ces luttes sont souvent synonymes d’extermination. Heureusement, certaines sont nobles, pacifiques et salvatrices, quand il s’agit d’extraire 850 millions d’êtres humains de l’analphabétisme, de la faim et de la misère.
Mais aujourd’hui, c’est pour la renaissance de la grande Nation chinoise que XI Jinping exhorte son peuple à lutter avec acharnement.
Le bonheur, la paix et la gloire des peuples doivent-ils donc forcément passer par leur embrigadement dans d’âpres combats, pas toujours consentis, à la modernité et à l’efficacité douteuses ?
Quoi qu’il en soit, prions pour que le vent d’hiver qui se lève ne se mue pas en ouragan. Il serait si décevant que ce peuple, intrinsèquement si gai et hédoniste, ne réduise le « Rêve Chinois » à une dure lutte.
* « La révolution n’est pas un diner de gala », disait Mao qui, dans la famille Marx, n’a hélas jamais connu Thierry.
Bruno Gensburger est interprète de conférence en mandarin et conseiller en diplomatie des affaires. Retrouvez chaque semaine sa chronique sémantique.