Dans le Catalogue classique des protestations et complaintes chinoises (CCPCC*) figure le concept de préjugé dont les « loups guerriers » sont prompts à nous faire le procès.
Souvent associé à l’arrogance - autre biais typiquement occidental - cette botte rhétorique permet, en surjouant l’indignation contenue, de tuer dans l’œuf toute tentative de débat sur une question gênante pour le gouvernement chinois.
Accusé de préjugés, l’adversaire est d’emblée disqualifié car ignorant, intoxiqué ou de mauvaise foi et donc, probablement raciste car secrètement nostalgique du colonialisme. Ainsi, avant même d’avoir une chance de débattre sur le fond, il lui faudra démontrer que le costume infâmant qu’on veut lui faire porter n’est pas le sien. Bonne chance !
Mais prenons un exemple d’actualité : nombre d’observateurs se demandent actuellement si, malgré ses dénégations, malgré les risques de représailles américaines et d’escalade du conflit, la Chine cèdera à la tentation de vendre des armes à la Russie contre l’Ukraine ?
Imaginons qu’à cette question brûlante, ma réponse soit un OUI catégorique, pour les raisons suivantes :
1- Quels que soient les risques géostratégiques encourus par la Chine, la dissimulation, l’appât du gain et la corruption y règnent en maîtres.
2- Dans sa posture de leader de grande puissance, Xi Jinping ne peut, au risque d’être perçu comme infantilisé et dominé par son rival, se laisser priver par Joe Biden d’un droi
t qu’il s’arroge lui-même sans complexes, vis-à-vis de l’Ukraine.
3- Il n’y a pas d’amour mais seulement des preuves d’amour. Ainsi, après les déclarations d’amitié sans limites sino-russes, Vladimir Poutine, en difficulté, attendra sans doute de son inoxydable allié une définition plus palpable des canons de la beauté.
4- La Chine ne peut prendre le risque d’une défaite Russe, dans cette guerre contre les valeurs occidentales.
Vous auriez là typiquement des arguments qui, pour les diplomates chinois, fleurent bon les préjugés occidentaux et ne sont dignes que de mépris.
Mais au fait, comment appelle-t-on dans la nomenclature chinoise des préjugés qui se révèlent exacts ?
*CCPCC : ne pas confondre avec l’autre CCPCC, Conférence Consultative Politique du Peuple Chinois, sorte de Sénat où en revanche, personne ne se plaint jamais.