Prostate - 前列腺 - Qiánlièxiàn
La rumeur courait déjà depuis un moment, mais récemment, c’est un journal de Hongkong qui l’a relancée. Mais, prudence, ça reste une rumeur.
L’ambassadeur de Chine en France, Lu shaye, l’illustre représentant de la diplomatie du pit-bull, serait sur le départ. Après quatre ans de bonze et Dalloyau services (comme quoi, il n’était pas toujours si intraitable), rien que de très normal, me direz-vous. Il a fait son temps, voilà tout.
Mais, ce qui est surprenant, c’est son affectation. Le voilà propulsé par son ministère de tutelle à la direction d’une organisation chinoise chargée des affaires extérieures non-gouvernementales : l'Association du Peuple Chinois pour l'Amitié avec l'Étranger (APCAE).
Après ça, qui dira encore que le PCC n’a pas d’humour ?
Créée en 1954 pour rompre l’isolement diplomatique de la Chine, cette "association", composée principalement d’anciens diplomates, de neveux de diplomates mais aussi de représentants du Front-Uni et de la Commission Militaire Centrale, s’efforce, grâce à une obscure diplomatie de couloir, de sous-sol et d’arrière-cours, de promouvoir : la coexistence pacifique, le développement commun, les échanges amicaux et la coopération mutuellement bénéfique entre les peuples. J’espère que je n’ai rien oublié…
Hébergé dans des bâtiments historiques situés sur la prestigieuse avenue Chang’an, ce discret Gagatorium (dont le site web reste inaccessible depuis l’étranger)* reçoit régulièrement des élus, des hommes politiques - français et étrangers - tant pour les convertir au Xiisme de la Nouvelle ère, que pour s’entendre confirmer par des flagorneurs professionnels, que la Chine est à la fois l’héritière d’une sagesse cinq fois millénaire et l’avenir du nouveau monde, face à un Occident déclinant.
Invités, régalés, flattés, et raccompagnés par des poignées de main parfois très directives**, ceux qui font allégeance aux principes de respect mutuel, d'égalité de bénéfice réciproques, d'ouverture, de transparence (aux caractéristiques chinoises), de non-ingérence, et autres poncifs emplumés de l’amitié inoxydable, ont droit à tous les égards et sont généreusement gratifiés du titre (désormais sulfureux) d’Amis de la Chine.
On y croise aussi quelques zozos - mi-affairistes, mi-idiots utiles - qui y ont leur rond de serviette. Généralement grands collectionneurs de photos de banquets et d’accolades en compagnie d’éminences grisâtres, ces « nêm droppers » vendent à leurs clients extatiques, l’illusion qu’ils ont l’oreille des conseillers du Prince. Hé hé, ça vaut de l’or, ça, Monseignor !
Alors, pourquoi cette relégation de l’Ambassador ?
Je sais bien qu’on ne peut comparer que ce qui est comparable. Mais tout de même, il y a des parallèles qui, contrairement à ce qu’on nous enseigne à l’école, finissent par se rejoindre. Ainsi, pour moi, Lu Shaye, de par la richesse de son palmarès, est à la diplomatie ce que Teddy Riner (le judoka le plus titré en championnat du monde) est au tatami.
Déjà très inspiré lorsqu’il était en poste à Ottawa, L’Ambassadeur-Loup avait brillé en accusant les médias canadiens de relayer « l’égotisme occidental et la suprématie de la race blanche ». Loin d’avoir été sanctionné par ses Autorités, il avait été promu au rang de vice-ministre et nommé en France où il a, depuis, volé de sommets en sommets. Au point que le Quai d’Orsay, prisant peu ses saillies,*** s’est même vu contraint à deux reprises de lui souffler dans les bronches (et pourtant, Dieu sait qu’il ne manquait pas d’air !).
Mais, malheureusement pour lui, son Gouvernement, qui jusque-là s’était abstenu de le recadrer, a été contraint de le faire, sous la forme d’un communiqué officiel, un peu confus, expliquant que ses déclarations sur l’Ukraine ne reflétaient que son opinion personnelle.
Ainsi, plus que ses fréquents dérapages, c’est sans doute cette grave perte de face infligée à ses Autorités qui lui aura valu cette… promotion.
Outre le fait que, pour se rendre à l’APCAE, il sera désormais plus prudent d’être vacciné contre la rage, je ne peux m’empêcher d’être inquiet pour le moral de son futur Président.
Après avoir connu le rythme frénétique des ambassades, je crains que celui, plus néphrétique, de sa nouvelle « Amicale des Prostates diplomatiques », ne finisse par éroder son enthousiasme et sa combativité.
Nul doute qu’il lui faudra puiser en lui de nouvelles ressources, s’il veut continuer dans ses nouvelles fonctions, à soutenir la comparaison avec un Teddy Riner, toujours au top. Et ce ne sont pas ses frères, Troublu et Fuitu****, qui nous diront le contraire.
* Voici le message qui apparaît : 您的请求疑似攻击行为!Suspicion de requête malveillante !
** Rappelez-moi d’écrire un jour quelque chose sur ces poignées de mains directives, qu’on ne trouve qu’en Chine.
*** Extraits du palmarès français de Son Excellence : pendant l’épidémie de Covid, il dénonce les soignants français qui « abandonnent leur poste en laissant mourir les patients ». Il insulte les chercheurs Adrian Zenz et Antoire Bondaz, qu’il traite de « hyène folle, de troll idéologique et de petite frappe ». Il qualifie les prisonniers Ouïghours de « stagiaires », déclare sur LCI que la Chine n’est pas une dictature, que les crimes, les purges maoïstes, les camps d’internement forcé des Ouïghours, les rapports de l’ONU, ne sont que « des bobards et des racontars », et last but not least, que les pays de l’ex-URSS n’ont pas de statut effectif en droit international.
**** Les célèbres, mais discrets Troublu et Fuitu Riner