问答 Wèndá
Un homme rentre dans le bureau de Vladimir Poutine et lui annonce fièrement :
- Camarade-Président, le FSB a retrouvé le cadavre de Gengis Kahn.
- Comment savent-ils que c’est lui ?
- Il a avoué.
C’est important, d’avouer. D’abord parce que « péché avoué à moitié pardonné » et ensuite parce que ça permet aux enquêteurs d’aller plus vite, aux juges d’être mieux disposés, aux avocats d’être plus détendus et donc, aux coupables d’être mieux défendus. C’est comme qui dirait du « gagnant-gagnant ». En confessant ses crimes, le condamné contribue à une Justice plus sereine, plus rapide et donc meilleure. Ségolène Royal l’avait bien compris, à son retour de Chine en 20071
Pourtant, en France, certains pensent différemment et c’est cette regrettable différence de perception qui a valu à de malheureux exposants chinois de se refaire expulser, comme l’année passée, du salon Milipol.
Mais peut-être ne connaissez-vous pas Milipol ? C’est bien normal puisqu’il s’agit d’un événement officiel, ouvert uniquement aux professionnels. C’est le Châtel-Guyon, non pas des constipés, mais des spécialistes de la sécurité publique et de la lutte contre la criminalité. Les exposants s’y retrouvent tous les ans dans la joie et la bonne humeur pour présenter, à Paris, leurs produits et leurs innovations.
Mais cette année encore, pas de chance ! Amnesty International et l’ONG Omega Research ont signalé à l’organisateur la présence de quatre entreprises chinoises qui y faisaient la promotion de matraques à pointes en acier, de menottes à pouces, de chaînes à entraves et autres équipements interdits en matière de maintien de l'ordre.
Soi-disant que ce matériel moyenâgeux n’est utilisé que pour la torture. On voit bien que ce ne sont pas ces ONG à la noix qui se tapent le boulot. Tenez, un exemple : la fameuse « Chaise du tigre 老虎凳 ». Quelle merveille !
Voilà une chaise d’interrogatoire qui vous changera la vie ! Légère (toute en alu), solide, d’entretien facile et bon-marché, elle ressemble à une grande chaise-bébé avec menottes fixes aux poignets et entraves aux chevilles. Elle assure un parfait maintien et se nettoie d’un simple jet d’eau pour éliminer fluides et matières organiques après usage.
Elle convient aussi bien aux « aveux robinets» qu’aux «aveux dentifrice »2. Ah oui, pardon, j’oubliais ! Vous n’êtes pas spécialiste. J’explique : les aveux-robinet sont ceux qui coulent tout seuls, après avoir suffisamment terrorisé le coupable, alors que les aveux-dentifrice nécessitent qu’on exerce, sur sa personne, suffisamment de pression.
Mais après tout, si les Occidentaux aiment se compliquer la vie, ça les regarde. Pierre Desproges disait pourtant : « Songez, mesdames et messieurs les jurés : sans l’erreur judiciaire, combien d’innocents courraient encore !?! »
Il ne reste plus qu’à espérer que d’ici le prochain salon Milipol, les Français auront corrigé leurs points de vue erronés et enfin compris qu’il valait mieux privilégier l’efficacité sur l’idéologie. Surtout s’ils veulent faire des affaires avec la Chine dans le cadre de la Communauté de destin pour l’humanité que préconise le Président Xi Jinping. Les perspectives sont immenses et ce serait tout de même ballot, pour si peu, de rater de telle opportunités, non ? Avouez !
Ségolène Royal avait loué la rapiditude de la justice chinoise, au retour de son mémorable passage à Pékin en janvier 2007.
Expression tirée du remarquable témoignage de Jean Pasqualini sur les camps de rééducation chinois : Prisonnier de Mao (1976).
Bruno Gensburger est interprète de conférence indépendant en chinois, conseiller en diplomatie des affaires, ex-diplomate, ex-directeur des relations extérieures chez Sanofi (Chine) et futur cadavre.
Karim Oyarzabal est illustrateur et auteur de bandes dessinées, il a été comédien en Chine pendant plusieurs années et est diplômé de l’Ecole Polytechnique.